EuroBusiness Media (EBM): VINCI, leader mondial des concessions et de la construction, a récemment publié ses résultats pour le premier semestre. Quelles perspectives pour le reste de l’année ? Réponse avec Xavier Huillard, Président-directeur général de VINCI. Nous approchons de la fin du troisième trimestre de l’année 2013. Comment cette année se déroule-t-elle pour VINCI ?
Xavier Huillard : L’environnement économique reste difficile bien sûr, mais néanmoins, globalement nous enregistrons en ce début d’année 2013 une performance meilleure que ce que nous pensions il y a encore quelques mois, avec une progression de notre chiffre d’affaires et de notre Ebitda et une contraction limitée de notre résultat opérationnel et de notre résultat net.
En France, l'activité a bénéficié de la montée en régime du chantier de la LGV Tours-Bordeaux. En dehors de France, la hausse du chiffre d'affaires est tirée par la croissance externe, conformément à la stratégie que nous avons engagée il y a plusieurs années maintenant.
Le résultat opérationnel semestriel a été affecté par les mauvaises conditions climatiques qui ont particulièrement pénalisé l’activité routière en France mais également dans un certain nombre d’autres pays européens. Enfin, nous avons dû provisionner les coûts occasionnés en Pologne pour faire face à la forte baisse de l’activité routière dans ce pays.
Sur le plan comptable, notre résultat a été pénalisé par les impacts de l'ouverture de la section Balbigny-Lyon de l'A89 ainsi que de la mise en service de l'élargissement de l'A63, qui toutes les deux ont eu comme conséquence un accroissement de la charge d'amortissement et des frais financiers.
EBM : L’évolution du trafic de VINCI Autoroutes semble avoir opéré un tournant, passant de négatif à positif au 1er semestre 2013. A quoi peut-on s’attendre concernant l’évolution du trafic dans l’avenir ?
Xavier Huillard : Oui la bonne nouvelle c’est que le trafic sur nos autoroutes est redevenu légèrement positif sur le réseau interurbain. Par ailleurs, la montée en régime du trafic sur le Duplex A86 entre Rueil-Malmaison et Vélizy se poursuit de manière très satisfaisante. Enfin l’activité économique en France semble avoir amorcé une reprise ; cela pourrait avoir un effet positif sur le trafic des poids lourds dans les prochains mois. Nous sommes ainsi sur la bonne voie pour accroître le chiffre d'affaires et l’Ebitda de VINCI Autoroutes.
EBM : Où en êtes-vous dans vos négociations avec l’Etat sur le plan de relance autoroutier ?
Xavier Huillard : Les négociations durent et je le regrette car, de notre côté, VINCI est prêt à mettre en œuvre rapidement les moyens nécessaires pour démarrer les travaux et participer, ainsi, au soutien de l'emploi. Nous sommes d’accord avec l'Etat sur le contenu du programme d’investissements ainsi que sur sa valeur. En revanche, la discussion sur les paramètres financiers permettant de compenser le coût de ces travaux par un allongement de la durée des concessions n'a pas encore abouti.
EBM : A la fin de l'année dernière, VINCI a été choisi pour l'acquisition d'ANA, concessionnaire des aéroports portugais. 2 questions : pourquoi investir dans les concessions aéroportuaires et pourquoi au Portugal ?
Xavier Huillard : Simplement parce que VINCI est un acteur mondial de premier plan de la gestion d'infrastructures de transport en concessions, avec Vinci Autoroutes qui gère la moitié du réseau autoroutier concédé français ; Vinci Park qui est un leader mondial du stationnement ; Vinci Concessions qui gère de nombreux ouvrages de franchissement (ponts, tunnels) en Europe mais également en dehors d’Europe, et qui d’ailleurs exploitera dans quelques années la LGV Tours-Bordeaux, le plus grand projet jamais réalisé par le Groupe. Et puis, Vinci Airports, qui gère déjà une douzaine de plateformes et qui représente globalement la gestion d’environ 10 millions de passagers chaque année.
Vinci souhaite renforcer sa présence dans ce secteur aéroportuaire, car c’est un secteur dont le potentiel de croissance est structurellement supérieur à la croissance économique. Les besoins en infrastructures aéroportuaires sont considérables dans le monde, et en particulier bien sûr dans les pays émergents.
Et donc l'acquisition d'ANA, qui exploite l'ensemble des aéroports du Portugal, soit 10 plateformes dont le hub de Lisbonne, répond parfaitement à cet objectif stratégique. Plus de 80% du trafic géré par ANA (c’est-à-dire environ 30 millions de passagers) est généré par des vols à l'international, avec une position particulière vis-à-vis du Brésil et de l'Afrique lusophone, qui sont des zones de croissance prometteuses. Le contrat de concession qui nous lie à l’Etat portugais, a une durée de 50 ans, et offre un cadre équilibré et incitatif à l'amélioration de la performance, à la fois dans le domaine de la gestion aéronautique que des revenus annexes non-aéronautiques. Enfin, nous pourrons sur cette acquisition, nous appuyer sur une équipe dirigeante locale constituée de très bons professionnels, très expérimentés.
EBM : Récemment, VINCI a porté sa participation au capital d'ADP à 8%. Quelle est la finalité de votre stratégie ?
Xavier Huillard : Vous vous souvenez que nous étions déjà actionnaires de ADP à hauteur de 3,3%. Nous avons donc simplement saisi l'opportunité offerte par l'Etat français de porter notre participation à 8%.
Nous pourrons ainsi disposer d'un poste d'administrateur au Conseil d'Administration de la société, et donc jouer un rôle plus actif dans le développement de cette très belle entreprise.
Ce qui est clair, c’est que ADP et VINCI disposent de compétences complémentaires qui pourront, lorsque les deux groupes y trouveront un intérêt commun, être mises en synergie. Cela pourra être le cas en particulier à l'international.
Dans ce cadre, VINCI sera un actionnaire loyal et de long-terme d'ADP, dont il soutiendra le management.
EBM : Quelles sont les perspectives pour l’activité Contracting ? Comment le carnet de commandes évolue-t-il ?
Xavier Huillard : Les activités Contracting enregistrent une belle progression grâce à l’avancement du chantier de la LGV Tours-Bordeaux mais également à une bonne dynamique à l'international. Vinci Energies, de son coté, résiste bien et tire partie de ces dernières acquisitions réalisées à l'international. Enfin, comme je l'ai indiqué, Eurovia a été affecté sur ce premier semestre par la météo défavorable et la baisse du marché polonais. Ces facteurs ne devraient pas se reproduire néanmoins au 2e semestre.
Au global, les prises de commandes sur l'ensemble de l'année pour les activités de Contracting devraient être au moins équivalentes à celles de l’an dernier. En conséquence, le niveau du carnet de commandes à la fin de l’année 2013 devrait rester proche de celui de 2012, soit environ 31 milliards d’euros, et ce en dépit de la consommation occasionnée par l’avancement du chantier de la LGV Tours-Bordeaux.
EBM : Quels sont vos principaux objectifs opérationnels pour le reste de l'année ?
Xavier Huillard : Je vois quatre priorités : d'abord réussir l'intégration au sein de VINCI Airports d'ANA, dont l'acquisition devrait être finalisée très prochainement ; ensuite, maintenir à plein régime le chantier de la LGV Tours-Bordeaux qui devrait atteindre son "peak" cette année et l'année prochaine, avec un volume de travaux annuel d'environ 1,3 milliard d'euros ; également, dans le secteur des autoroutes, poursuivre le dialogue avec l’Etat en vue d'essayer de faire aboutir le programme d'investissements complémentaires dans le cadre d'un nouveau plan de relance de l'économie et de soutien de l'emploi ; enfin, dans le Contracting, veiller en permanence à la bonne adaptation des charges à la nouvelle donne de nos marchés en Europe de façon à préserver nos marges et accélérer par ailleurs notre développement au grand international.
EBM : Enfin, à quatre mois de la fin de l’année, comment voyez-vous la performance financière pour l’ensemble de l’année 2013 ?
Xavier Huillard : La performance du 2e semestre 2013 devrait être proche de celle réalisée au 2e semestre 2012. Sur l'ensemble de l'année 2013, nous devrions donc enregistrer une légère croissance organique de notre chiffre d’affaires. Par ailleurs, la baisse du résultat opérationnel et du résultat net sur l'ensemble de l'année devrait être moins prononcée que celle constatée au 1er semestre 2013.
EBM : Xavier Huillard, Président-directeur général de VINCI, je vous remercie.
Xavier Huillard : Merci.