EuroBusiness Media (EBM) : Sanofi, leader mondial et diversifié de la santé, publie aujourd’hui ses résultats du premier trimestre 2016. Jérôme Contamine, bonjour. Vous êtes le Directeur financier de Sanofi. Quels sont les faits marquants de ces résultats ? Quels changements avez-vous opérés pour cette première publication de la performance des Entités globales ?
Jérôme Contamine : Nous sommes très satisfaits de la solide performance au 1er trimestre, ainsi que des progrès réalisés dans le cadre de notre feuille de route 2020. Le chiffre d’affaires agrégé du Groupe progresse de 0,7 % à près de 8,5 milliards d’euros. Hors Venezuela, il progresse de 3,0 %. Au 1er trimestre, la progression des ventes est surtout due à Sanofi Genzyme, à Sanofi Pasteur et à Merial, mais aussi à notre croissance dans les marchés émergents.
Notre BNPA des activités progresse de 5,3 % à taux de change constants, atteignant 1,34 euro.
Comme vous le savez, nous avons restructuré le Groupe en cinq Entités opérationnelles globales (GBUs) afin de simplifier notre reporting interne, renforcer notre spécialisation et nous concentrer davantage sur nos moteurs de croissance. Cette nouvelle structure est entrée en vigueur le 1er janvier dernier. J’attire votre attention sur la forte croissance réalisée par la GBU Sanofi Genzyme. Son chiffre d’affaires progresse de 20,5 % à 1,2 milliard d’euros au 1er trimestre, soutenu par la franchise Sclérose en plaques. Quant à la GBU Sanofi Pasteur, elle poursuit sa croissance, avec un chiffre d’affaires de 625 millions d’euros sur la période (+8,2 %) malgré le recul attendu des ventes de Pentacel®, dû à des limitations d’approvisionnement aux États-Unis.
Parmi les événements marquants du trimestre, notons d’importants progrès réalisés pour deux de nos principales molécules en phase avancée de développement, dupilumab et sarilumab, ce qui souligne le fort potentiel de notre nouvelle franchise Immunologie.
EBM : Sanofi Genzyme réalise une fois de plus un excellent trimestre. Quels sont les principaux moteurs de votre activité Médecine de spécialités pour ces trois premiers mois ? Pensez-vous que cette performance est durable ?
Jérôme Contamine : Comme je l’ai mentionné, Sanofi Genzyme a de nouveau contribué fortement à la performance du trimestre. Grâce aux franchises Sclérose en plaques et Maladies rares les ventes de l’activité Médecine de spécialités ont augmenté de 18,4%.
Dans le domaine de la Sclérose en plaques, nos deux marques ont montré une belle performance, avec une hausse de 64 % d’Aubagio® à 279 millions d’euros. C’est le médicament à prise orale dont la croissance est la plus rapide sur ce segment. Pour Lemtrada®, nous écartons progressivement les obstacles à l’utilisation de ce produit. Les ventes ont plus que doublé au 1er trimestre 2016, à 88 millions d’euros. Comme vous le savez, ces deux marques sont encore en phase de lancement et continuent de renforcer notre position compétitive sur le marché mondial en croissance rapide de la sclérose en plaques.
EBM : Vous venez de lancer Dengvaxia® aux Philippines. C’est le premier vaccin contre la dengue au monde, et il a reçu un soutien important depuis que le Groupe stratégique consultatif d’experts sur la vaccination (SAGE) l’a recommandé à l’OMS le 15 avril dernier. Comment comptez-vous utiliser cet appui pour les campagnes de vaccination prévues en Asie et en Amérique latine ?
Jérôme Contamine : Nous sommes ravis de pouvoir annoncer le lancement du premier programme public de vaccination contre la dengue aux Philippines, en avril 2016. Au premier trimestre, les ventes du premier vaccin contre la dengue, Dengvaxia® ont atteint 19 millions d’euros ; ce produit est désormais approuvé dans quatre pays, dont le Mexique et le Brésil.
La récente recommandation d’utilisation de Dengvaxia® publiée par le SAGE à l’OMS est très encourageant. Le SAGE conseille aux pays endémiques d’envisager l’introduction du vaccin contre la dengue dans le cadre d’une stratégie de prévention intégrée comprenant la lutte anti-vectorielle, dans le but d’alléger efficacement le poids de la dengue. Cette importante recommandation reconnaît le bénéfice de santé publique de notre vaccin contre la dengue ; elle devrait faciliter l’obtention d’autorisations de mise sur le marché dans d’autres pays endémiques courant 2016.
EBM : Dans le domaine du Diabète, comment votre portefeuille d’insuline glargine (Toujeo® et Lantus®) résiste-t-il sur un marché de plus en plus concurrentiel ?
Jérôme Contamine : Le principal point à retenir est que la performance de notre entité mondiale Diabète reste conforme aux perspectives révisées d’octobre dernier : un recul annuel de 4 à 8 % des ventes globales sur la période 2015-2018.
Au premier trimestre, le chiffre d’affaires mondial de l’activité Diabète atteint 1,7 milliard d’euros (-4,5 %), ce qui est une amélioration par rapport au recul de 12,6 % observé au trimestre précédent. Comme prévu, les ventes aux États-Unis ont été impactées par un prix net moyen inférieur. Cela se traduit par une baisse des ventes de 11,1 %, à comparer à la baisse de 25,1 % publiée au dernier trimestre 2015. Cela étant, en termes de volumes, je tiens à signaler que la part de marché de notre activité glargine combinée (Lantus® et Toujeo®) reste relativement stable sur le marché de l’insuline basale aux États-Unis.
En Europe, l’activité Diabète progresse de 4 % à 255 millions d’euros, malgré la concurrence d’un biosimilaire. Dans les marchés émergents, les ventes progressent de 12 %, hors Venezuela, avec une contribution élevée en Chine, due à notre position de leader sur le marché du diabète en rapide croissance dans ce pays.
EBM : Où en est le projet d’échange d’activités avec Boehringer Ingelheim (dont la finalisation est attendue au 4e trimestre 2016) ? Comment cette transaction favorisera-t-elle votre ambition de devenir le leader en Santé grand public ?
Jérôme Contamine : Je peux vous confirmer que nos discussions exclusives avec Boehringer Ingelheim relatives au projet d’échange d’actifs Santé grand public/Santé animale sont en bonne voie. Nous espérons signer un accord en milieu d’année, et le finaliser d’ici la fin de l’année.
Les atouts de Boehringer Ingelheim dans le domaine de la santé grand public sont très complémentaires à ceux de Sanofi, tant en termes de produits que d’implantations géographiques. L’activité Santé grand public de Boehringer Ingelheim renforcerait notre positionnement en Allemagne et au Japon, où notre présence est limitée, et nous permettrait d’étendre notre implantation dans nos catégories prioritaires. Nous y gagnerions l’accès à plusieurs marques phares. Notre activité Santé grand public aux États-Unis, en Europe, en Amérique latine et en Eurasie connaîtrait aussi une forte expansion, permettant au Groupe de prendre des positions de leader dans plusieurs pays et/ou catégories de produits clés.
EBM : Pourriez-vous nous expliquer la situation de Sanofi au Venezuela et son impact sur les résultats du premier trimestre ? Comment a évolué votre performance dans les marchés émergents au 1er trimestre 2016 ?
Jérôme Contamine : Comme nous le savons, le Venezuela connaît une conjoncture économique particulièrement difficile, qui a impacté notre BNPA des activités de 9 centimes au 1er trimestre.
Tout d’abord, du point de vue des taux de change. Faute de signaux d’amélioration de la situation économique au Venezuela, nous avons décidé de modifier le taux de change appliqué au Bolivar vénézuélien dans nos comptes. Sanofi applique désormais un taux de change flottant de 273 Bolivars vénézuéliens par dollar US. Ce nouveau taux de change remplace le taux officiel de 6,3 Bolivars vénézuéliens par dollar US utilisé au premier trimestre de l’an dernier.
Deuxièmement, nous avons décidé de déprécier la valeur de notre exposition, résiduelle, ce qui correspond à une perte de change de 102 millions d’euros comptabilisée dans la ligne Autres produits d’exploitation. Ainsi, nous n'avons plus d'exposition au Venezuela dans notre bilan.
Si on exclut ce pays, notre croissance dans les marchés émergents atteint 13,1 %. Nous pensons dépasser de loin nos concurrents. Malgré le ralentissement économique, malgré la volatilité dans certains pays, les ventes dans notre principale zone géographique, l’Asie, progressent de 15,6 %. Les ventes en zone Asie sont en particulier portées par la progression de 17,6 % réalisée en Chine, où Sanofi croît plus vite que le marché. En Chine, nous continuons de bénéficier d’un portefeuille bien adapté de marques de qualité dans le domaine des maladies chroniques et des vaccins. Nous gagnons également des parts pour nos principales marques sur le marché croissant des villes moyennes (counties), à l’écart des mégapoles.
EBM : Pour conclure, que pouvez-vous nous dire de vos frais d’exploitation et de vos perspectives concernant le bénéfice par action ?
Jérôme Contamine : Les frais d’exploitation agrégés s’élèvent à 3,7 milliards d’euros au premier trimestre, en hausse de 3,0 % à taux de change constants. À y regarder de plus près, on constate que les frais de R&D agrégés atteignent 1,3 milliard d’euros (+6,5 % à changes constants), traduisant nos nouvelles collaborations dans le domaine de l’immuno-oncologie et du diabète, le programme de Phase III pour dupilumab et l’étude ODYSSEY consacrée aux impacts cardiovasculaires de Praluent®, ainsi que les études post-marketing relatives aux produits récemment lancés. Cela se traduit par une augmentation de 15,0 % du ratio des frais de R&D sur chiffre d’affaires Groupe, pour le premier trimestre 2016, par rapport à la même période de 2015.
Par ailleurs, les frais commerciaux et généraux agrégés s’élèvent à 2,4 milliards d’euros au premier trimestre, en hausse de 1,3 % à taux de change constants. Cette augmentation reste limitée grâce à une gestion rigoureuse des frais généraux et administratifs sur la période et à la réallocation de ressources pour le lancement de nos produits phares. Au 1er trimestre 2016, le ratio des frais commerciaux et généraux sur chiffre d’affaires progresse de 0,3 point à 28,3 %, par comparaison à l’exercice précédent.
D’ici la fin 2016, nous devrions réaliser des économies en matière de frais commerciaux et généraux grâce à la priorisation et la mise en place progressive de notre nouvelle organisation ; elles seront partiellement compensées par les dépenses liées aux lancements de produits. Nous prévoyons une hausse des charges d’exploitation à un taux similaire à 2015, à taux de change constants.
Quant aux perspectives pour 2016, nous confirmons nos prévisions d’un BNPA des activités globalement stable par rapport à 2015, à taux de change constants, sauf événements majeurs défavorables imprévus.
EBM : Jérôme Contamine, CFO de Sanofi, merci beaucoup.
Jérôme Contamine : Merci à vous.